L’action complète   20 janvier 2020

« Je venais de traverser une bonne partie du pays lorsque mon train s’arrêta dans une petite gare à 20 kilomètres du terminus. Pour des raisons techniques, nous devions attendre 40 minutes avant de reprendre notre route. Quelques voyageurs décidèrent de descendre se dégourdir les jambes. J’en fis autant.
Progressivement une file de taxis commença à se former à la sortie de la gare. Ce type d’incident devait être assez fréquent, car les chauffeurs proposaient aux voyageurs de terminer leur parcours en taxi. Je me laissai séduire par la solution. C’est alors que je fis la connaissance de Raoul, un chauffeur de taxi peu ordinaire.
Pour commencer, il remonte avec moi dans le train pour m’aider à prendre mes bagages. J’ai été surprise par cette attention. Il aurait très bien pu m’attendre devant sa voiture, le coffre ouvert et le compteur enclenché…
– Where are you going ? Me demande-t-il avec un accent terrible et pourtant sans complexes
(je poursuis cette histoire en français)
– Au Consulat de France
– Ah… Passeport perdu ?– Mon sac a été volé, avec tous mes papiers dedans.
– C’est dommage pour le temps… Vous avez fait vos photos d’identité ?
– Non… Pourquoi, il en faut une pour un laissez-passer ?
– Bien sûr. Il faut 2 photos.
– J’ai pourtant appelé le Consulat. On m’a demandé une photocopie de mon passeport, mais on ne m’a pas parlé des photos…
– Il y a un photomaton à l’entrée du Consulat. Les employés comptent dessus, mais cette cabine ne fonctionne qu’une fois sur dix. Vous devriez utiliser celle de « la centrale des bus »… C’est sur notre route.
– Allons-y alors. Merci beaucoup.
– Oh c’est normal, vous avez perdu assez de temps comme ça !
Quelques minutes plus tard, le taxi se gare devant l’entrée de la station centrale. Je m’apprête à descendre lorsque Raoul me tend trois pièces de monnaie et me dit :
– Vous aurez besoin de ça !
Je suis stupéfaite ! Voila qu’il me prête de l’argent maintenant… En effet, les trois pièces me servent à actionner l’appareil. Je le rejoins 7 minutes plus tard, Raoul m’ouvre la portière. Nous repartons. Il me dit avec un sourire non dissimulé :
– Comme ça vous avez gagné du temps.
Ca fait 3 fois qu’il me parle de temps… Je suis à plus de 4.000 kilomètres de mon lieu de travail, et il me parle comme s’il savait que la gestion du temps est au centre de mes occupations.
– Mais… Comment savez-vous que j’aime optimiser mon temps ?
– Ca se voit… C’est comme les gens qui aiment le soleil : ils sont bronzés !
– Alors là vous m’intéressez… Dites m’en plus !
– Quand une personne aime le temps, elle a une façon particulière de marcher, de s’asseoir, de sourire, même de se gratter…
– Et qu’est-ce que vous avez remarqué dans mes comportements ?
– A la gare, vous avez tout observé autour de vous, comme si vous étiez sûre de trouver une solution. C’est comme ça que je repère les bons clients… Et vous ? Pourquoi avez-vous choisi mon taxi ?
– Certainement parce que je savais que c’était l’Annexe du Consulat de France…
Nous rions de bon coeur, puis nous partageons quelques anecdotes. Raoul m’explique que si son métier se limitait juste à conduire les gens, il s’ennuierait terriblement : « A chaque fois que je conduis un client, je m’intéresse à son problème. Votre but est de vous rendre au Consulat de France pour obtenir un laissez-passer, car vous avez un avion à prendre cet après-midi. Vous avez besoin d’une action complète, pas seulement d’un moyen de transport. »

L’action complète ! Voilà un sujet à méditer…
Intégrer une approche globale de la mission qui nous est confiée, comprendre le véritable besoin de l’autre, et donner plus, toujours plus que ce qu’il attend de nous. Surprendre par notre efficience »

Cette entrée a été publiée le lundi 20 janvier2020 à 10 h 00 min, et rangée dans Non classé. Vous pouvez suivre les réponses à cette entrée via son flux RSS 2.0.Vous pouvez laisser un commentaire, ou faire un rétrolien depuis votre site.
   Article lu 4 377 fois

Aucune réponse

Laisser un commentaire